« L’heure vient, et elle est déjà venue, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité; car ce sont là les adorateurs que le Père demande » (Jean 4 :23). Nous sommes–nous souvent posés la question : « suis-je un vrai adorateur de Dieu, à savoir celui dont parlait Jésus quand il s’adressait à la femme Samaritaine » ? Car quand on regarde notre monde d’aujourd’hui, la multiplicité des formes de prières, la variété des lieux de cultes et le nombre de guides de prières nous amènent à nous demander : « qui adore vraiment Dieu? ». Dieu est-il le principal ou plutôt est-il utilisé comme un « faire-valoir », un alibi pour arriver à d’autres fins, moins avouables ? Ces questions se posent au moment même où on assiste à un grand intérêt pour la chose religieuse, une sorte de ferveur pour les lieux de prière dans un environnement d’incertitude et de crises socio-économiques qui touchent toutes les couches de la société. Dans un tel environnement, l’homme devient plus vulnérable et ne sait plus « à quel saint se vouer ». Et c’est dans cette ambiance que certains pseudos guides religieux peuvent prendre racine en s’arrogeant des droits que Dieu lui-même ne leur reconnait pas. Ils créent ainsi la confusion dans l’esprit d’un grand nombre, et empêchent les fidèles de voir qu’à côté d’eux, il y a les vrais humbles serviteurs du Seigneur, ceux que Dieu utilise pour accroitre son œuvre ici-bas. Mais comment distinguer l’ivraie du bon grain, dans ce méli-mélo général ? Comment séparer ceux qui utilisent la prière comme un fonds de commerce, d’avec les vrais ouvriers du Seigneur ? Comment éviter que l’action d’une poignée de personnes qui utilisent Dieu pour leurs propres affaires vienne ternir l’image des nombreux vrais serviteurs de Dieu qui témoignent chaque jour de l’évangile ?
L’église et l’argent
Ce serait illusoire de penser qu’on peut se passer de l’argent pour travailler aujourd’hui. L’usage de l’argent ne date d’ailleurs pas d’hier. Depuis l’antiquité, l’homme a utilisé l’argent sous toutes les formes variées. Et l’église s’en est aussi bien servie, depuis le temps des apôtres jusqu’à nos jours. En parlant d’offrandes ou de dimes, ce sont souvent de grosses sommes d’argent qui sont mobilisées si les fidèles respectent bien leurs engagements.
« Amenez dans la maison de Dieu vos dimes, vos biens…! » (Malachie 3 :10). C’est ce qu’on a l’habitude d’entendre. Ce n’est pas que Dieu soit si pauvre, au point de ne pas prendre en charge ses propres affaires. C’est parce que Dieu a toujours voulu utiliser les humains pour accomplir son œuvre. Ceux qui ont bien compris cela tirent une grande satisfaction en participant aux actions nécessitant la contribution en espèces ou en nature des uns et des autres. La fierté d’avoir été co-ouvrier, d’avoir sa “part de briques” dans l’ouvrage, est si grande que chaque fidèle digne de ce nom ne se mettrait pas en marge de cet élan général d’engagement sous aucun prétexte que ce soit. Contrairement à ce qu’on entend souvent « du dehors », ce n’est donc pas une voie de spoliation de fidèles si, pour gérer ce type de collectes, il y a un mécanisme transparent de gestion des biens. Bien au contraire, on ne fait que perpétuer ce que les hommes de Dieu ont toujours fait, à l’image de Moise lors de la construction du premier tabernacle (Exode 25 :1-9) ou de Salomon pour l’édification du premier grand temple d’Israël (1 Rois 5 :15-18).
Grâce aux collectes de fonds auprès de leurs membres, les églises peuvent disposer d’un patrimoine bien appréciable. A titre illustratif le « denier de culte » (ou de Saint Pierre) qui est un montant annuel payé par chaque fidèle baptisé, aurait rapporté à l’église Catholique en 1990 environ 58 millions de dollars. On cite aussi souvent le cas de la « Billy Graham Evangelistic Association (BGEA)», cette association fondée par le Pasteur protestant Billy Graham et qui travaille depuis plusieurs années dans l’œuvre d’évangélisation, avec des moyens colossaux (budget de plus de 102 millions de dollars US en 2013).
La gestion de telles sommes d’argent demande un minimum d’organisation et de maîtrise de soi, si l’on ne veut pas que l’argent vienne corrompre la raison d’être de l’église. Bien souvent, dans l’écoute de Dieu dans la prière, les responsables chrétiens ont su, dans la masse d’argent qui arrive, ôter le levain qui fait lever la pâte de l’orgueil et de l’affairisme. Mais certains mauvais exemples viennent souvent ternir l’image noble des hommes de Dieu.
Le coût de la prière ?
On a souvent entendu dire que certains « prieurs » tarifaient leurs séances de prière. Ils insistent beaucoup sur le « remerciement » après exaucement lors de séances de prières le plus souvent administrées à domicile, dans un recoin de la ville. Pas un simple « merci », mais plutôt un « merci sous forme de présents», un « merci lourd ». De ce fait, ceux qui, visiblement, pouvaient offrir des présents consistants bénéficiaient de bien « ferventes prières » tandis que pour les moins nantis, on n’avait à peine le temps de leur dire « bonjour ». Pourquoi monnayer ainsi un acte que vous avez accompli à partir d’un don reçu gratuitement ? Pourquoi vous mettre seul en selle, tout en éclipsant le vrai auteur des merveilles et des miracles, à savoir Jésus-Christ ? Si vous êtes attaché aux biens matériels et financiers, et si vous attendez systématiquement une récompense matérielle suite à une prière, vous risquez un jour de subir le même sort que Guehazi, le serviteur d’Elisée qui devint lépreux après avoir réclamé des présents au Général Syrien Naaman (2 Rois 5 :20-27). Nous devons savoir que le seul prix requis pour l’exaucement d’une prière pour autrui est la foi. « Prends courage, ma fille, ta foi t’a guérie” a dit Jésus à une femme atteinte d’une perte de sang depuis douze ans (Mathieu 9:22). En retour de l’exaucement, c’est « un grand merci au Dieu tout puissant ». Oui, pendant sa vie terrestre, Jésus a prié pour les pauvres, les mendiants, les riches, mais sans demander aucune rétribution matérielle quelconque. « Retourne dans ta maison, et raconte tout ce que Dieu t’a fait », avait-il souvent dit aux miraculés (Luc 8 :39).
Quand l’argent « s’approprie » l’église
«L’église est un business», m’a dit un jour un jeune étudiant qui semblait avoir fréquenté quelques-unes de nos églises indépendantes actuelles. Son argumentation est simple: quand vous arrivez à l’église, vous ne voyez que le sceau de l’argent sur tout ce qui se fait. Et je compris en partie ce qu’il voulait m’expliquer. Oui, il est vrai que le renouveau spirituel a fait naître de nombreux mouvements (protestants comme catholiques) qui œuvrent pour la propagation de l’évangile – et c’est bien car c’est une recommandation formelle du Christ – mais la place que prend de plus en plus l’argent dans l’œuvre laisse penser que les chrétiens n’ont pas compris ce que Jésus voulait expliquer quand il disait «Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur » (Mathieu 6:21). En effet, dans certains lieux de prière, l’argent a pris un tel pouvoir, une telle importance qu’on pourrait se demander si Dieu lui-même ne représente pas que la portion congrue lors des séances.
Un ministre n’est tout de même pas en haillon !
Les serviteurs de Dieu sont des « Ministres de Dieu » (Ephésiens 3 :7)). Si, en tant que Pasteur des brebis, vous êtes malheureux, visiblement misérable, on pourrait bien douter de votre message d’espérance venant d’un Dieu qui s’occupe réellement de ses enfants. L’église doit donc bien prendre soin matériellement de ses responsables, car c’est une recommandation. Pour cela, l’apôtre Paul nous conseille : « Que chacun donne comme il l’a résolu en son cœur, sans tristesse ni contrainte ; car Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Corinthiens 9 :7). Mais Dieu voudrait aussi des serviteurs qui puissent toujours dire, comme l’apôtre Paul : « Donnez-nous une place dans vos cœurs ! Nous n’avons fait tort à personne, nous n’avons ruiné personne, nous n’avons tiré du profit de personne » (2 Corinthiens 7 :2). Pendant son séjour durant son ministère terrestre de trois ans et demi, Jésus nous a donné des indications d’une bonne organisation de groupe, à savoir la responsabilisation de chacun dans le groupe pour diverses tâches. En tant que chef de groupe à la tête de ses douze disciples et de la foule, il a par exemple évité d’avoir une « mainmise » sur l’argent ; mais il a plutôt donné la charge de trésorier du groupe à Judas Iscariote (Jean 13 :29).
Dieu ou Mammon ?
S’il vous était donné le privilège de demander ce que vous voulez, à l’exemple de Salomon, le puissant roi d’Israël (972-933 avant Jésus-Christ), qu’auriez-vous demandé ? Argent, or, pouvoir, santé, honneur, paradis, longévité,… ? La liste est longue. Salomon, lui, a demandé la sagesse (1 Rois 3 :9). Et ce choix plut au Seigneur qui, en plus de la sagesse, lui donna une grande richesse et une puissance dont les échos parvinrent au monde entier.
Aujourd’hui, devant la généralisation du pouvoir de l’économie capitaliste et matérialiste, face au pouvoir démesuré que confère le pouvoir de l’argent, serions-nous suffisamment sages pour mettre la volonté de Dieu à la tête de nos doléances. En tant que serviteur de Dieu, à différents niveaux que ce soit (Pasteurs, Prêtres, diacres, anciens, intercesseurs,…), sommes-nous suffisamment sages pour mettre Dieu à la première place ? En tant que chrétien, quel que soit le don que Dieu nous a fait (don de guérisons, de miracles, de prédications,…), nous devons garder la « tête froide » et savoir que Dieu est le seul et unique véritable auteur de nos grandes œuvres, et ainsi lui rendre toute la gloire. Comme a dit le Christ : « Cherchez premièrement le royaume et la justice de Dieu; et toutes ces choses vous seront données par-dessus (Mathieu 6:33). Si nous suivons ce précieux conseil du Christ, nous éviterons de tomber dans le piège mortel, celui de se retrouver serviteur de Mammon, le dieu de l’argent.
Par Kobo Maurice OUEDRAOGO