En entrant dans le laboratoire de sciences physiques de l’ex Institut des Mathématiques et de Physique de l’Université de Ouagadougou en 1989, nous avons été abasourdi par l’archaïsme du matériel de travaux pratiques, par rapport au laboratoire d’un simple lycée, le Lycée Scientifique de Yamoussoukro en Côte d’Ivoire.
En faisant le tour de quelques villes du Burkina, nous ne nous sommes jamais expliqué pourquoi l’Etat a supprimé les internats dans les Lycées et collèges au motif qu’ils étaient budgétivores. En faisant le point des structures de financement des activités de jeunesse aujourd’hui, nous n’avons pas pu nous empêcher de constater que les structures finançant les chants et les danses fleurissent au Faso alors que celles soutenant la promotion de l’excellence scolaire et académique « rasent les murs ». Et soutenir l’excellence, ce n’est pas faire du saupoudrage, mais plutôt, c’est octroyer des ressources conséquentes pour des bourses au secondaire et au supérieur, c’est empêcher qu’un brillant élève ne soit renvoyé à cause du manque de 6000 F pour payer ses frais de scolarité en 6ème, c’est persuader par la pratique (et non les discours) que l’école est la principale voie de l’épanouissement loin devant le commerce brut. En réfléchissant, nous ne pouvons nous empêchant d’admettre que l’éducation au Burkina a encore un long chemin à faire. Pourquoi crier « haro sur la baisse du niveau de l’enseignement ! » quand on laisse l’école mourir à petit feu ? Pourquoi ne pas conjuguer un minimum d’efforts et y mettre les moyens qu’il faut à la hauteur des enjeux du moment. Car on sait qu’aucun pays ne peut amorcer le décollage économique si son système éducatif est à la traîne. Ce n’est pas pour rien que l’accès à l’éducation est un des trois principaux indicateurs utilisés par le PNUD pour calculer l’Indice du Développement Humain (IDH). Pourquoi alors s’étonner si depuis plusieurs années le Burkina tient la queue malgré les efforts fournis par son peuple. Même si on construit des gratte-ciel à Ouaga 2000, même si on reproduit « les 2 tours jumelles de New York » à la zone du projet ZACA, et si les admis au bac continuent d’errer dans les villes à la recherche de salles de cours, si plus de la moitié des admis au CEP retournent au village sans pouvoir écrire une phrase complète, le Burkina tiendra toujours la queue. Bien sûr, Ouaga continuera de remporter des prix de ville coquette d’Afrique (et c’est à notre honneur aussi), notre Président sera couronné mille fois « Docteur Honoris Causa » des plus grandes Universités du monde, et à la radio on entendra les montants faramineux des conventions signées « pour la réduction de la pauvreté », mais nous resteront toujours à la queue. Pourtant, le peuple Burkinabe est réputé être l’un des plus vaillants et des plus travailleurs d’Afrique. Mais comme un sort qui s’abat sur lui, il scrute l’horizon qui s’assombrit tous les jours que Dieu fait, et sans qu’un Messie ne s’annonce dans son subconscient. Le Messie, ce n’est pas un politicien venu de l’Est ou de l’Ouest ; c’est celui qui est conscient que, comme l’ont écrit Nelson Mandela et Graça Machel, « les enfants sont le moteur de notre indignation tout comme le point de convergence de nos espoirs » (1). Un moteur qu’on aime a droit à la meilleure huile et au meilleur garage d’entretien. La jeunesse burkinabe a droit à ce qui est excellent ; il faudra y penser.
Les Enfants de 2008
Note : (1) : In « La situation des enfants dans le monde 2001 », UNICEF.